Notre école ne doit pas mourir!

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Le CIS, Centre d’Intégration Scolaire de Montréal, qui depuis 40 ans reçoit et parvient à réintégrer dans le circuit « régulier », les enfants « trop dérangeants » de 8 à 18 ans que lui envoient 7 Commissions scolaires de la région montréalaise, est menacée de fermer ses portes (c.f. article paru dans LE DEVOIR « L’école de la dernière chance » en péril par Marco Fortier, 21 novembre 2017). De nombreuses démarches ont été effectuées, mais disons brièvement qu’à ce jour, rien ne bouge du côté des ministères concernés, tout autant que du côté de la CSDM qui veut évincer le CIS de ses locaux à cause d’un boom démographique auquel elle fait face.

En lisant les articles parus la semaine dernière dans le Journal de Québec et le suivi dans le Journal de Montréal sur les enfants trop dérangeants, la situation que vit le CIS m’a semblé d’autant plus absurde. Comment le ministre peut-il dire qu’il faille davantage d’écoles spécialisées en réintégration scolaire et refuser du même coup, pour des questions administratives, de financer les infrastructures d’une école publique spécialisée, forcée de quitter le bâtiment qui l’héberge depuis 40 ans?

Soyez assurés que le CIS poursuit inlassablement ses démarches pour éviter de fermer ses portes. Cette « école de la dernière chance » a cependant besoin de tous les appuis d’organismes ou autres sensibilisés à la situation d’enfants « trop dérangeants » pour nos écoles et à celui du décrochage scolaire. 

Voici la lettre qu’une ancienne élève de l’école, maintenant membre du CA, a fait parvenir lundi dernier au Ministre Proulx.

 Françoise Stanton, conseillère, Communications, Centre d’Intégration Scolaire de Montréal

 

« Notre » école ne doit pas mourir!

Monsieur le Ministre de l’Éducation aidez-nous à la sauver!

« Mon » école? C’est une école extraordinaire qui, à l’adolescence, m’a évité de justesse le décrochage scolaire, avec tout ce qui s’en serait suivi de mésadaptation sociale. Mais dans un an, Monsieur le Ministre, cette merveilleuse école, le Centre d’Intégration Scolaire de Montréal (CIS) comme on l’appelle risque sérieusement de fermer ses portes.

Comme vous le savez déjà, le CIS sera alors définitivement chassé de l’édifice de la Commission scolaire de Montréal qu’il occupe, pour répondre au boum démographique auquel fait face la CSDM. Le problème, c’est que le CIS n’a pas les sous nécessaires pour se replacer ailleurs sur le territoire de Montréal. Pourquoi? Parce que cette « école de la dernière chance », comme certains la qualifient, qui est entièrement financée par les deniers publics, soit les montants que lui versent les 7 commissions scolaires qui font appel à ses services en lui transférant des élèves de 8 à 18 ans, jugés « ingérables », est considérée par vous, Monsieur Proulx et par vos fonctionnaires, comme une école privée. « École privée », dites-vous parce qu’elle n’appartient à aucune commission scolaire spécifique! Et c’est à cause de cela que votre cabinet nous a informés qu’elle n’est éligible à aucune subvention gouvernementale pour son déménagement ni pour son réaménagement dans un autre édifice, qu’il faudrait évidemment transformer en école. Bref, cette sorte d’abstraction administrative, d’école privée qui n’en est pas une, risque d’empêcher des élèves comme moi, sur la voie du décrochage scolaire et social, de bénéficier des ressources nécessaires pour pouvoir croire à nouveau dans un système qui les a si souvent rejetés. Encore une fois on semble « nous » mettre de côté, nous les « ingérables »!! Est-ce-là votre vision du soutien à la persévérance scolaire Monsieur le Ministre? J’ai du mal à le croire.

Monsieur Proulx, j’ai personnellement fait partie de ces jeunes à haut risque de décrochage qui fréquentent le CIS. Mon parcours scolaire avait en fait très mal commencé. Avant même de terminer mon secondaire 2, j’avais fréquenté 13 écoles. Étiquetée « trouble de comportement », je n’arrivais pas à évoluer dans un système scolaire que j’estimais peu flexible, routinier et qui ne croyait pas en moi. Même si j’étais douée, j’accumulais les échecs et je ne souhaitais rien d’autre que de quitter l’école pour de bon. En fait, c’est l’école que je fréquentais alors qui a pris les devants et m’a mise à la porte. J’avais 15 ans. Heureusement, il y avait une ressource pour des élèves comme moi, le Centre d’Intégration Scolaire (CIS). Là, une équipe constituée d’éducateurs et d’enseignants spécialisés m’a accueillie et sans complaisance, mais avec beaucoup de dévouement et d’ouverture, m’a redonné confiance au système d’éducation québécois. Et devinez quoi? Pour une première fois depuis longtemps, j’ai cru en mes capacités, j’étais de nouveau MOTIVÉE!

Aujourd’hui, moi, « la cause perdue », je termine mon baccalauréat en communication, je suis devenue une adulte responsable et je siège même au Conseil d’administration du CIS. Un parcours dont je suis fière!

C’est pourquoi moi, Stéphanie et tous les élèves qui cosignent cette lettre aujourd’hui, vous supplions Monsieur le Ministre, de réviser vos positions et DE SOUTENIR ENFIN CONCRÈTEMENT l’une des rares institutions PUBLIQUES qui se spécialise dans l’intégration scolaire d’élèves trop souvent rejetés par le système régulier.

Notre école ne doit pas mourir, ne croyez-vous pas Monsieur le Ministre? 

Stéphanie, ancienne élève et membre du CA du Centre d’Intégration Scolaire

 

La lettre originale envoyée au Ministre Proulx a été cosignée par plus de 70 étudiants et/ou membres du personnel du CIS.

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