Le deuil de l’école, un deuil parmi tant d’autres

0
473

Après trois semaines d’école, les semaines ici sont devenues tout un combat. Une nouvelle catastrophe météorologique émotive est sur le point d’éclater. Nous essayons de se préparer au pire et bien sûr, si c’est possible, de l’éviter. Nous faisons de la prévention auprès de chaque membre de la famille afin d’éviter les trop gros traumatismes et les dommages collatéraux, même si nous savons qu’il y en aura. Forcément. Il y a un minimum que nous ne pouvons malheureusement pas éviter.

Depuis la garderie, petit homme ne veut pas quitter la maison. C’est trop demandant pour lui. Ça lui demande trop d’adaptation. Lui faire prendre l’autobus a été un beau défi à relever. L’envoyer jour après jour à l’école en maternelle, en première année et maintenant en deuxième année, est un énorme défi. Un défi pour lui, mais tout un aussi pour nous, ses parents, qui devons le convaincre chaque jour avec dynamisme, positivisme, douceur, ruse, etc., d’aller à l’école. Tous les moyens sont bons pour le convaincre d’aller à l’école. Temps d’ordi ou de iPad, bonbons, temps privilégié avec l’adulte de son choix, renforcements positifs verbaux et physiques, changement d’adulte à la gestion du matin, le mettre en crise dans l’autobus (on s’est dit qu’après une constance, il finira par comprendre… mais non), aller le reconduire directement à l’école et que ce soit la direction qui vienne le chercher dans mon véhicule, sans toutefois avoir de collaboration ni de résultat. Il n’y a rien que nous n’avons pas essayé. Mon petit homme est même allé à l’arrêt d’autobus en ballon-sauteur. Vous voyez le genre? Quand je vous dis que nous avons tout essayé!

Nous devons CONSTAMMENT innover. Bon sens que c’est épuisant! Cet enfant brûle tous les moyens. Pourquoi? Parce qu’il n’est pas bien. Il est en bris de fonctionnement. C’est un cri de détresse qu’il nous lance. Il faut l’écouter et se rende à l’évidence. L’école, aussi disponible, gentille et humaine soit-elle, ne répond pas aux besoins spécifiques de mon petit homme. Je pense que petit homme a atteint sa limite. La classe régulière, le transport régulier, le rythme de vie des élèves et le rythme des apprentissages vont trop vite pour lui. Il est saturé. Il a donné tout ce qu’il pouvait nous donner et maintenant je pense que c’est à nous de lui offrir un répit. Je pense que c’est à nous de s’adapter à lui, à ses besoins. Je voudrais lui offrir de la légèreté. Je voudrais lui redonner le goût d’aimer, de rire et d’avoir du plaisir à l’école. Je ne pourrai jamais refuser le bien-être et le bonheur à mon fils, même si ça nous demande un changement de cap radical. Je suis prête pour la classe spécialisée, pour le transport adapté, pour des services externes. Même si ça me déchire le cœur de le séparer de sa sœur, eux qui sont toujours ensemble et de le séparer de ses amis. C’est un autre deuil parmi tellement d’autres que nous, les parents d’enfants différents, nous devons vivre.  Mais, comme je dis toujours : Par amour pour lui, par amour pour eux, je ferai tout ce qu’il faut. MON FILS AVANT TOUT.

Donc, depuis quelques semaines chez nous, non seulement on se creuse la tête, mais en plus, on passe des heures en rencontres avec l’école, avec les services externes, du temps au téléphone et surtout, ENCORE DE L’ATTENTE.  Parce que oui, faire des demandes, ça veut dire entamer des démarches. Et qui veut dire démarches veut automatiquement dire délais. Le hic, c’est que le mal-être de mon fils n’attend pas lui. Je ne peux pas le mettre en standby le temps qu’on ait des réponses ou trouvons LA solution idéale pour lui. Et encore, qui veut dire solution idéale, ne veut pas dire que c’est existant ou possible de le faire.

J’ai rencontré tous les intervenants de mon fils. Toute l’équipe sociale et celle de la santé se sont rencontrées et consultées. Ensuite, ces deux équipes devaient rencontrer l’équipe scolaire. Ils ont été une douzaine à discuter de mon fils. J’espérais tellement que toute cette attente et leurs échanges apportent des solutions gagnantes. Malheureusement, sans succès.

En nommant les besoins de mon fils et ses verbalisations, je me suis fait répondre qu’il était impossible de placer mon fils en classe d’adaptation scolaire par prévention. Malgré qu’il ait tous les diagnostics, il doit absolument être en bris de fonctionnement à l’école. Je trouve ça ridicule que nous sachions tous comment cette histoire se terminera, mais que nous ne prévenons pas son bris de fonctionnement. Je trouve ça triste. Je trouve ça triste d’attendre que mon fils, ainsi que les autres enfants dans le besoin, n’aient plus du tout le goût à l’école et qu’ils prennent cette dernière complètement en aversion. Le manque d’argent et de ressources font en sorte qu’on doit éliminer les solutions et les traitements préventifs pour se concentrer seulement sur les mesures d’urgence, les solutions et les traitements curatifs. C’est d’un tel dommage, car nous pourrions tellement diminuer les symptômes des diagnostics de nos enfants en s’occupant d’eux rapidement et en leur offrant les services qui correspondent à leurs besoins, sans attendre qu’ils foncent droit dans le mur pendant que nous les regardons faire, les bras croisés.

PARTAGER
Article précédentLa pomme ne tombe jamais loin de l’arbre
Article suivantEntre 2 mondes : Quand la différence devient spectaculaire!
Je suis une éducatrice spécialisée de métier et maman de trois merveilleux enfants qui doivent composer avec leurs différences et les obstacles que ces différences leurs occasionnent quotidiennement. Cette vie familiale au rythme particulier nécessite plusieurs adaptations tant sur le plan familial, sur le plan amoureux que sur le plan professionnel. Je me fais un plaisir de vous partager mon vécu, ma réalité, afin de sensibiliser notre société aux enfants différents ayant des besoins différents. Connaître, comprendre, c'est mieux accepter.