J’étais assise dans cette clinique. Je te voyais, plus je t’entendais. Là, de l’autre côté du mur, dans le petit recoin où personne ne va habituellement.
Comme si ce petit recoin était fait pour nous, parents d’enfants différents. À l’abri des regards car au moins, eux, on peut les éviter.
J’entends ton petit coco, parler et chanter très très vite. Je te sens, même à travers ce mur, je sens ton épuisement, ta force et ta colère. Je suis là, je comprends ton désarroi face à tout ça. Lorsque tu lui chuchotes des CHUT! Ça me rappelle moi avec mon coco, quand tout semble être trop pour mes épaules de maman. Nos épaules qui sont parfois lourdes de tout ce tourbillon autour de nous.
Je sens ta frustration envers le rendez-vous qui est déjà passé l’heure et que tu es épuisée d’attendre encore avec ton enfant. Car personne ici ne comprend que c’est peut-être le troisième rendez-vous du mois, peut-être même de la semaine et il se peut même que ce soit le troisième de la journée.
Je sens ta fatigue quand tu le regardes et le laisses faire car, de toutes façons, tu sais très bien que tu le reprends seulement pour montrer aux autres personnes présentes que tu essaies, mais qu’il ne t’écoute pas. Que tu essaies si fort, mais que tout ce que tu risques de déclencher, c’est une crise car lui aussi est tanné d’attendre dans les salles comme celles-ci, trop familières pour un enfant de cette âge.
Toi qui t’étais juré d’avoir fait ta carapace contre ces jugements, il arrive parfois qu’ils réussissent quand même à la percer. Car oui, parfois c’est dur et tu sais, tu as le droit qu’ils t’atteignent parfois.
Je suis là, de l’autre côté du mur et je suis sûrement l’une des seules dans cet auditoire qui te comprend, mais je peux te jurer que ton enfant, il ne m’énerve pas.
Je le trouve même très enjoué et ça me fait sourire. Je l’écoute t’expliquer ses cent mille et une idées et mon Dieu que je le trouve intelligent. Je l’entends parfois frapper le mur avec ce que je crois être son pied, sûrement par inadvertance dans toute cette excitation et je le trouve drôle. J’aime ça qu’il soit là, ça donne un petit côté léger à cet endroit beaucoup trop monotone.
Tu sais, tu peux en être fière. Ton enfant, il a l’air merveilleux…