Je te mentirais si je te disais que c’est toujours facile. Accueillir un enfant autiste dans mon service de garde, ça n’a rien de facile. Même si parfois, en surface, ça peut sembler calme et lisse. Dans le feu du quotidien, on fait souvent face à des bourrasques et des tempêtes, mais on y arrive, un petit pas à la fois. Parfois c’est compliqué, parfois non, mais on essaie toujours de s’ajuster toutes les deux. Et avec tes parents, on fait une sacrée équipe.
Je te mentirais si je te disais que j’avais tout ce qu’il fallait pour t’aider à grandir et à évoluer dès le premier jour. C’est vrai que mes connaissances des troubles neurodéveloppementaux et de leurs comorbidités ainsi que ma facilité à ajuster mes outils pédagogiques et mes interventions aux besoins des enfants ont été un atout. C’est vrai que ma base de connaissances sur l’autisme m’a été précieuse. C’est vrai que mon expérience de maman d’enfants avec des besoins particuliers m’a grandement aidé pour supporter et guider tes parents. Mais au fond, que tu sois autiste ou non, ne changeait rien à ma façon d’agir avec toi. Ni à mon souci de comprendre tes besoins et d’y répondre tout en t’aidant à t’épanouir chez moi. C’est simplement que pour toi, les besoins sont différents de la majorité.
J’ai appris avec toi.
J’ai appris avec tes parents.
J’ai appris sur l’autisme.
J’ai appris sur les troubles d’intégrations sensorielles.
Je continue d’apprendre avec toi.
Je te mentirais si je te disais que je n’avais aucune qualité pour travailler avec toi. C’est vrai que j’ai une certaine facilité avec les enfants qui ont des défis. Je me sens à l’aise avec eux et j’ai la profonde conviction que notre monde devrait abolir beaucoup de barrières et inclure la différence dans ses communautés, beaucoup plus qu’il ne le fait déjà.
C’est vrai que déjà toute petite, je rêvais d’un monde plus juste, inclusif, aimant et plus ouvert.
C’est vrai que les petits humains me passionnent. Ce qui ce passe dans leur petit cœur, pour moi, c’est comme une carte aux trésors. Et ce trésors, ce sont tes petits bras qui s’enroulent autours de mon cou et tes grands yeux qui cherchent mon regard, parce que tu veux que je sois fière de toi.
Je te mentirais si je te disais que ce n’est pas plus de travail. Des heures, j’en ai passées à lire les rapports des professionnels, afin de comprendre tes besoins et réussir à appliquer leurs recommandations pour que tu te sente bien. Des heures, j’en ai passées à t’observer, à remplir des fiches d’observations et des plans d’interventions. Des minutes, j’en ai passées au téléphone avec ta maman, à discuter de tes difficultés, de tes forces et de tes besoins. Des questions, j’en ai eues même en pleine nuit, à me demander ce que je pourrais intégrer pour t’aider à faire face à telle ou telle situation.
Je te mentirais si je te disais que je ne me sens jamais dépassée. Que j’ai toujours la solution immédiate et que je ne remets jamais en question mes compétences. Et je te mentirais aussi si je te disais que mon cœur ne se gonfle pas de bonheur chaque fois que tu vis une réussite et que je te sens bien, avec nous et parmi nous.
Mais mon petit cœur, je te mentirais si je te disais que de travailler avec toi n’a pas été l’une des plus belles expériences de ma vie d’éducatrice.
Que tu m’as fait grandir.
Que tu m’as amenée à repousser mes propres barrières et mes limites.
Que notre équipe serait incomplète sans toi.
Que tu m’as amenée une foule de nouvelles connaissances et que tu nous permets de voir la vie un peu plus en couleurs chaque jour.
En ce mois de l’autisme, c’est à toi que j’ai envie de penser et de dire merci.
Merci pour toute cette joie et ces rires aussi flamboyants que le soleil que tu partages avec nous.
Merci de me permettre de croire en un monde plus doux. Tu fais de nous de meilleurs humains. Petits et grands.