Nous sommes en plein mois de la sensibilisation au Syndrome de Gilles de la Tourette. Depuis deux semaines, plusieurs parents d’enfants touchés par ce syndrome, des intervenants et des professionnels, tentent tant bien que mal de transmettre de l’information et de démystifier ce trouble neurodéveloppemental qui touche notre famille. Ce syndrome mal connu ou perçu souvent seulement pour ses tics qu’on imagine souvent spectaculaires… Moi qui tente depuis des années d’expliquer ce trouble autour de moi… Je n’ai plus rien à dire.
Depuis plusieurs semaines, j’y pense… Je cherche LE texte à écrire. Celui qui ferait le tour du monde et permettrait à tous et chacun de comprendre réellement le SGT…
Mais rien ne me vient. Rien ne sort.
J’aimerais raconter. J’aimerais dire.
J’aimerais exprimer les difficultés, les batailles avec le système, les suivis et les rendez-vous épuisants pour tout le monde, mais je n’y arrive pas.
J’aimerais parler du manque de service pour les enfants SGT. La méconnaissance effroyable du syndrome.
J’aimerais parler de la médication. Des comorbidités tellement plus pesantes que les TICS. L’opposition et les crises de rage. Les TOC. L’anxiété parfois handicapante. L’inattention et l’impulsivité. Parfois les troubles d’apprentissage. Les difficultés dans les habiletés sociales. Les fonctions exécutives souvent peu développées. Le besoin d’accompagnement criant de ces enfants qui en ont trop peu…
Mais je ne peux pas.
Je suis soudain face au Syndrome et je suis sans mots.
Je suis sans mots parce que je suis sous le choc.
Je suis sous le choc de ce diagnostic qui a officiellement été rédigé ce 18 avril 2019. Après trois ans d’attente et six longues années de questionnements. Il est tombé en même temps que le diagnostic de douance et d’hypersensibilité et s’est ajouté à celui de TDAH avec impulsivité.
Trois ans à savoir, aussi certainement que le ciel est bleu.
Trois ans de questionnements, d’inquiétudes profondes et de recherche de solutions.
Trois ans à attendre le rendez-vous avec le pédiatre. Puis la travailleuse sociale. Et la pédopsychiatre. Et la psychologue. Pour revenir vers la pédopsychiatre.
Trois ans de colères et d’incompréhension ahurissante.
Trois ans de batailles et de luttes.
Trois ans à expliquer, informer et démystifier.
En plus du reste. En plus des particularités du haut potentiel et du TDAH. En plus du trouble anxieux et des nuits sans sommeil.
En trois ans, j’ai tout dit. Et les trois années d’avant, j’ai tout pleuré, tout cherché, tout expliqué, encore et encore, d’un intervenant à l’autre, d’un professionnel à l’autre, d’un livre à l’autre. Je sentais la colère de ma petite humaine d’être mal comprise. Moi, je voulais tellement l’aider. On réussit, malgré tout…
Mais voilà, nous sommes en plein cœur du mois de la sensibilisation au Syndrome de Gilles de la Tourette et je ne peux plus parler, parce que ma tête et mon corps sont épuisés. Je suis une maman fatiguée et le temps de me remettre du choc étrange de ce diagnostic, pourtant non surprenant, je garde mon énergie à m’occuper de mes petites humaines. Les serrer dans mes bras, les faire rire, les coller…
L’été arrive avec ses promesses de soleil et de chaleur et je me dis qu’on va y arriver. Ce nuage d’engourdissement va se dissiper et la vie reprendra son cours normal. Avec ses défis, comme avant. Pas plus, pas moins.
Je suis une maman fatiguée, mais je suis une maman fière et heureuse.
Parce que j’ai la petite fille la plus courageuse que la terre n’ait jamais portée. Parce que sa personnalité lumineuse, drôle à mourir et pleine d’éclats me rend heureuse. Parce que j’aime la différence qui fait de chaque humain quelqu’un de profondément unique.
Parce que j’ai confiance en demain. Confiance en ses capacités merveilleuses qui font partie d’elle et de cette étincelle éblouissante qui brille au fond de ses yeux.
Confiance en ce rire magique qui éclabousse le monde autour d’elle et cette énergie débordante qui lui fait gravir les plus hautes montagnes. Malgré la peur, malgré les sensations envahissantes et cette clairvoyance par moment effrayante. Au centre de ces diagnostics, il y a la petite humaine incroyable qui est ma fille.
Nous sommes au cœur du mois de la sensibilisation au Syndrome de Gilles de la Tourette et finalement, je n’ai qu’une chose à dire : je t’aime Clara.