Douleur

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Si seulement tu savais comme tes mots me blessent. Mais non, devant toi, je présente un visage neutre, comme si tes menaces ne m’affectaient pas. J’y entends la provocation plutôt qu’un réel danger, ce qui fait que je ne prends pas le téléphone pour appeler à l’aide. Je sais que tant que le ton n’en sera qu’un de provocation, je peux gérer la situation.

Mais j’ai mal. Tellement mal de t’entendre crier ces injures, cracher ce fiel, ce venin, cette rancœur qui semblent t’habiter dans ces instants de totale absence. Car tu n’es plus là. Ce n’est plus toi. C’est ce désordre qui prend toute la place, comme si un autre venait t’habiter.

Toi, habituellement si doux, affectueux, cajoleur, tu te transformes tel le Dr. Banner se transforme en Hulk. Il n’y a plus de contrôle. Tu n’es que colère, hargne et rage. Tu n’es soudain plus mon fils, mais une boule de mots destructeurs qui ravagent tout avec chaque syllabe.

Ceux qui sont témoins de ces éclats, de ces pertes de contrôle te pensent sûrement un enfant-roi avec une mère trop molle. Sans doute croient-ils que ce n’est qu’un manque de rigueur, de discipline de ma part qui t’auront conduit au trouble de comportement.

J’ai beau savoir qu’ils ignorent, qu’il n’y a pas suffisamment d’informations transmises, je leur en veux. Je leur en veux de juger. Je leur en veux de ne pas me tendre la main. Je leur en veux de leurs regards lourds de reproches. Je leur en veux d’ignorer l’information que je veux leur donner. Je leur en veux de ne pas connaitre cette souffrance…

J’ai si mal de ne pouvoir te soulager, de ne pouvoir prendre sur moi ces réactions que tu ne contrôles pas, ces tics qui te secouent, ces différences que tu perçois à travers le regard des autres. Cette douleur de ne pouvoir t’épargner ces épreuves que tu traverses, ce chemin parsemé d’obstacles et d’ignorance. La douleur de trop souvent ne pas savoir moi-même si j’en suis triste ou enragée.

La douleur de ne pas savoir si mes interventions auprès de ton frère pour l’aider à comprendre sont bonnes. L’incertitude d’un futur que je veux rempli d’espoir et de possibilités. La douleur de la peur qui me ronge à l’intérieur quand je t’entends me crier ces mots qui tuent encore et encore. Je ne m’y habitue pas. Je ne m’y habituerai jamais.

J’ai le cœur brisé, réduit en miettes chaque fois que je crois que nous sommes passés à une autre étape et que je nous vois faire ce retour vers le passé. Un passé où je me suis perdue, où je me suis brûlée. Un passé qui m’a épuisée.

J’ai souvent l’impression d’avoir versé tant de larmes qu’elles seront bientôt épuisées. Déjà, il m’arrive trop souvent d’avoir ces sanglots secs, où ma propre colère semble fermer la digue qui menace de s’écrouler.

J’ai si mal de nous sentir seuls, isolés.  Si mal de voir la pitié dans les regards que je croise. Si mal de savoir qu’on me ménage de peur de me voir à nouveau m’effondrer. Si mal avec mon cœur mal rapiécé…

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Éducatrice à la petite enfance depuis une vingtaine d’année, adepte de l’entrainement en force pour ne pas perdre complètement la tête, Nancy Ringuet, très possiblement TDAH, est maman de deux garçons à diagnostics : un grand TDA sévère et un plus jeune SGT, TDAH impulsivité mixte et TOP. C’est un long combat qui aura mené aux diagnostics du plus jeune, et un long combat qui s’engage pour faire reconnaître ses besoins. Passionnée de recherches et assoiffée d’en apprendre plus, elle fouille le net sous toutes ses coutures. Elle partagera ici des textes et réflexions sur ce vécu différent de mère chef de famille, avec un conjoint dont le travail l’amène à être absent.