La communication, c’est la vie!

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1979

Je m’appelle Paul, j’ai 23 mois, je suis atteint du syndrome de Down ou trisomie 21. J’ai une surdité sévère bilatérale et congénitale qui m’oblige à porter des appareils auditifs.

J’ai deux grands frères Louis et Jules. Jules, lui, est autiste, diagnostiqué à l’âge de 18 mois. Son principal souci est qu’il a des difficultés de langage. Il n’arrive pas à s’exprimer correctement et il n’arrive pas à bien se faire comprendre. Ça le perturbe beaucoup et il se met facilement en colère. Il crie, il pleure, il s’isole.

Pour pouvoir l’aider, ma maman a fait beaucoup de formations. Elle a appris le Makaton, le TEACCH, le PECS. Elle apprend la pédagogie Montessori et se forme en Langue des Signes Française par le biais d’ateliers bébés signeurs et en suivant une formation professionnelle.

Grâce à toutes ces formations, maman a créé plein de petits outils pour aider mon frère à communiquer. D’abord, elle a utilisé des photos, plus concrètes, plus proches du réel pour illustrer les outils. Puis, quand mon frère a grandi, elle a utilisé des images ou des dessins d’un petit garçon en action.

Elle a donc créé un planning journalier détaillé sur une grande feuille plastifiée avec une ligne de scratch verticale et des images pour détailler les actions de la journée : je me lève, je m’habille, je me lave les mains, je déjeune, je me brosse les dents, je joue, je vais à l’école, etc.

Tout ce dont mon frère a besoin comme repères et organisation au quotidien. Il sait ce qu’il doit faire et peut anticiper une partie de sa journée. Sans ce planning il est perdu.

Ensuite, elle a constitué des séquentiels pour les toilettes et l’utilisation de la salle de bain en détaillant l’entrée dans les toilettes avec le petit garçon qui ouvre la porte,  qui allume la lumière, qui referme la porte, se déshabille, s’assoit, qui n’oublie pas de s’essuyer, se rhabille, tire la chasse d’eau puis éteint la lumière et va se laver les mains. Dans la salle de bain, il y a un séquentiel pour les différentes actions que l’on peut faire dans cette pièce, comme se laver les mains, se laver les dents, prendre son bain ou se doucher. Ces séquentiels, comme pour le passage aux toilettes, détaillent chaque fait et geste afin de bien montrer comment procéder.

Dans la chambre de mon frère, maman a disposé une petite armoire avec sept bacs. Chaque bac est étiqueté d’un jour de la semaine. Maman et mon frère y préparent les vêtements de chaque jour. Mon frère sait donc où se trouve ses vêtements et il s’habille tout seul maintenant.

Dans la cuisine et la salle de jeux, maman a créé des tableaux avec, pour la cuisine, ce que  mon frère aime manger et boire. Une fois encore, ce sont des images ou des photos scratchées sur une planche mise à disposition de mon frère. Elle a ajouté également des photos de mon frère quand il mange ou quand il boit. Quand il a faim ou soif, il prend la photo correspondante sur le tableau avec l’aliment ou la boisson de son choix. Il donne les deux étiquettes à maman ou papa pour qu’il puisse avoir ce qu’il veut. Dans la salle de jeux, il y a le même genre de tableau mais avec des photos de jeux ou des pochettes de DVD. Quand mon frère veut jouer à un jeu en particulier ou quand il veut regarder un dessin animé, il saisit l’étiquette correspondante pour montrer son envie.

Pour l’extérieur de la maison, maman a constitué un petit carnet sur le même principe que les tableaux avec des photos de tout ce que mon frère aime ou pourrait avoir envie de faire ou de manger ou de boire. En fait, ce carnet est un porte-cartes de visite. Maman y a glissé les photos et mon frère le transporte dans la poche de son manteau ou dans son sac.

Dans la maison, maman a aussi créé un « éphéméride ». Elle a peint une planche avec de la peinture aimantée pour changer un peu des scratches, a fait des étiquettes avec la date, des horloges pour la météo et les saisons. Finalement, elle a réalisé une horloge pour l’humeur du jour parce que mon frère ne sait pas bien identifier ses émotions. C’est un moyen pour maman et lui de travailler dessus.

Maman a également créé un train des anniversaires. Il y a douze wagons pour représenter les douze mois de l’année. La photo de chacun des enfants qu’elle garde y est ajoutée dans le wagon correspondant au mois de son anniversaire. Cela permet à tous de se repérer dans le temps et de savoir qui fêtera son anniversaire et quel mois.

Tous ces outils permettent à mon frère de communiquer avec maman et papa. Il évite ainsi les crises de frustration parce qu’il peut exprimer ses envies alors que sa parole est difficilement compréhensible. Cela lui permet aussi de se repérer dans le temps et d’anticiper chaque moment de sa journée. Il n’est plus désorienté et il sait et comprend pourquoi et comment il doit faire telle ou telle chose.

Et moi, avec mon handicap et ma surdité, j’ai des difficultés avec le langage et la communication. Même si je suis encore jeune, j’ai un peu de retard par rapport à la plupart des enfants. Alors je commence à apprendre la Langue des Signes Française avec une amie de maman. Je signe avec elle pendant deux séances d’une demi-heure par semaine. Et j’adore! Je retiens déjà quelques signes et toute la maison m’applaudit quand je les répète. C’est mon grand bonheur ça d’être félicité et applaudi par tout le monde.

Pour m’aider, maman a collé de petites affiches avec des bébés qui signent dans la maison.  Ces affiches montrent des signes de la vie courante de bébé. En même temps, ça sert aussi à mon frère et on peut signer tous les deux. Il me montre les signes qu’il connaît et moi aussi et on s’applaudit et on se félicite. Maman m’a promis que tout ce qu’elle avait réalisé pour mon frère, elle l’utiliserait pour moi aussi. C’est génial et tellement agréable de pouvoir comprendre et se faire comprendre.

La communication, c’est la vie!

Les pictogrammes utilisés par cette maman pour la routine quotidienne proviennent du site

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Je suis la maman de trois garçons de 1, 6 et 11 ans, trois rayons de soleil aussi différents les uns que les autres, mais qui éclairent nos vies tous les jours. Le plus jeune de mes trois garçons a une trisomie 21 parfaite avec un vrai chromosome en plus, bien complet sans déformation, une vraie réussite. Mon second garçon a eu un tout petit diagnostic de TSA à ses 18 mois. Mais vraiment tout petit le TSA, tout léger, et tout ce qui est petit est mignon. Et mon aîné, pour montrer la voie à ses frères, voit certaines choses de la vie en nuances de gris, surtout pour le rouge et le vert. J’ai travaillé en crèche pendant 10 ans, avec des enfants tous plus ou moins différents, parce qu’à la base chaque enfant est unique et puis parce que j’ai côtoyé des enfants autistes, des enfants trisomiques, des paraplégiques, des myopathes… J’ai aussi été animatrice en centre de loisirs puis directrice. Aujourd’hui, afin de sociabiliser mes petits bouts, je suis assistante maternelle en garde de 3 petits. J’essaie de concilier ma vie de mère et de femme, entre le travail, la maison, les visites chez les spécialistes et autre orthophoniste, psychologue, psychomot…