Seule…

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Ça tourne en boucle dans ma tête depuis un moment déjà. Je trouve ça dur ces temps-ci. Comprenons-nous, j’apprécie la solitude. Je n’ai jamais évité de me retrouver seule avec moi-même. J’ai même pas mal toujours été de type solitaire. Pas asociale. Je dirais plutôt sociallyawkward.

Une part de moi a toujours eu l’impression d’être totalement inadéquate socialement. D’être de trop, de ne pas « fitter » dans ce décor social. D’en dire toujours trop ou pas assez… Pis autant je suis bien seule avec moi-même, ce qui n’arrive pas souvent malgré ce qu’on pourrait penser, autant en ce moment j’aurais besoin d’une présence extérieure. Tsé quelqu’un qui ne partage ni mon adresse, ni mon nom de famille, ni ma génétique, ni mon quotidien… Un intrus. Quelqu’un qui aurait les deux pieds totalement groundés hors de ma vie… Quelqu’un qui n’aurait pas les deux pieds dedans jusqu’aux oreilles, genre… comme… style…

Mais…

J’ai l’impression que mon quotidien est trop lourd. Que lui ou moi, ou les deux, ont fait fuir le (trop) peu de vie sociale que j’avais. Pis desfois, j’aimerais juste ne pas avoir à avoir les deux pieds dedans jusqu’aux oreilles avec une paille dans les deux narines pour arriver à respirer. Ne pas avoir à être constamment derrière mes enfants pour tout et je dis bien tout. Pour les voir avancer. Pour les voir vivre les plus petites réussites. Y’a des jours, comme aujourd’hui, où je n’y vois pas de fin, où j’ai l’impression de vivre un interminable chemin de croix.

J’ai ce besoin de prendre le téléphone et d’appeler quelqu’un en sachant, en ayant totalement confiance, que la personne qui me répondra sera ravie d’entendre ma voix, trouvera les mots pour me faire rire, me faire sortir de mon quotidien, me changer les idées, mais saura aussi m’écouter alors que j’essaie d’expliquer dans quel marasme je vis sans que j’ai l’impression de m’imposer… Pis je me rends compte que je n’ai pas ça dans ma vie. Que je n’ai pas le sentiment de l’avoir jamais eu.

Quand je regarde derrière, tout ce que je constate, c’est un sentiment qu’on tolérait ma présence. Que je bouchais un trou qu’on a vite comblé avec quelqu’un d’autre quand j’ai libéré la place. J’occupais une chaise que n’importe qui d’autre aurait tout aussi bien pu remplir.  Toutes mes meilleures amies m’ont tassée pour quelqu’un d’autre assez rapidement. Des amitiés à long terme, je ne connais pas vraiment ça. Alors j’avoue qu’un jour, j’ai pas mal cessé d’essayer. Sans m’en rendre compte. J’ai juste… arrêté.

Et là maintenant, je n’ai personne pour m’écouter dire que j’ai ce sentiment d’être inadéquate. Comme mère, comme partenaire, comme conjointe, comme femme, comme être vivant… Quand j’essaie d’imaginer comment seront mes enfants dans 5, 10, 15 ou 20 ans, je ne vois rien… c’est le néant. Parce qu’il y a tellement de murs qui se dressent sans cesse devant nous… Parce qu’il y a des jours où, un simple message comme j’en reçois (trop) souvent, fait déborder la coupe du doute et basculer cet équilibre pour lequel j’ai tant l’impression de ramer à contre-courant  quotidiennement…

Quand la gestion de tout devient trop lourde, devient un irritant… Quand, comme maintenant, le fait qu’aucun de ses amis ne soient disponibles fait de ma vie une guerre pour rester debout. Quand la pensée des vêtements qui sont tolérés puis non tolérés, de la médication qu’il ne faut surtout pas oubliée, de l’hygiène qui tourne en bataille, de bouffe à préparer en sachant que la réaction en bout de ligne sera sans doute un « beurk », que le sommeil n’a pas de qualité, que le couple semble au neutre parce que ma libido se fait la malle…

Je n’ai personne à qui me confier. Et ce silence pèse lourd. Si lourd. Je ne sais plus à quand remonte ce dernier café. Je n’ose plus sortir mon pèse-personne. Je dois me refaire une garde-robe. Je ne veux plus me regarder dans le miroir. Me maquiller est un prétexte pour ne pas pleurer… Ça fait un an que je n’ai plus d’ongles, je les arrache, tout comme la peau qui les entoure. J’ai peur d’échouer… Mais tout ça, je n’ai personne à qui le dire. Mon téléphone est silencieux. J’ai l’impression de perdre mon vocabulaire tellement 99.9% de mes interactions au quotidien sont avec des moins de 15 ans…

Et quand finalement j’essaie… Je me rends compte que je ne sais pas comment… Je suis perdue.

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Éducatrice à la petite enfance depuis une vingtaine d’année, adepte de l’entrainement en force pour ne pas perdre complètement la tête, Nancy Ringuet, très possiblement TDAH, est maman de deux garçons à diagnostics : un grand TDA sévère et un plus jeune SGT, TDAH impulsivité mixte et TOP. C’est un long combat qui aura mené aux diagnostics du plus jeune, et un long combat qui s’engage pour faire reconnaître ses besoins. Passionnée de recherches et assoiffée d’en apprendre plus, elle fouille le net sous toutes ses coutures. Elle partagera ici des textes et réflexions sur ce vécu différent de mère chef de famille, avec un conjoint dont le travail l’amène à être absent.