On va se l’avouer, avoir un enfant différent apporte son lot de soucis. Les problèmes financiers ne sont pas exclus du lot et bien au contraire font, je crois, la manchette de notre anxiété. Lorsque nous ne pourrons pas travailler à temps plein car les rendez-vous se cumuleront. Quand on devra finir plus tôt pour aller le chercher car l’école n’arrive pas à le gérer. Quand on devra payer les stationnements et le gaz pour aller aux dits rendez-vous.
Tout ça finit par nous exploser en plein visage, on finit par s’engouffrer sous une montagne de dettes. Et là, je ne parle pas des spécialistes du privé qu’on devra payer car bien sûr, notre enfant est assez difficile pour ne pas être géré à l’école publique, mais pas assez affecté pour être vu prioritairement par des spécialistes qui pourraient l’aider. Pour tous les parents d’enfants à besoins particuliers, on va ou nous sommes passés par là.
Puis lorsque le diagnostic sort enfin, on nous remet un magnifique questionnaire de Prestation pour enfant handicapé. Comme s’il faisait partie de son dossier. À noter qu’il sera très difficile à remplir, surtout émotionnellement. La partie où on doit écrire une lettre pour expliquer les difficultés de notre enfant nous apportera de la tristesse et les phases du deuil seront à refaire.
Mais voyant les factures s’empiler, le stress financier et bien sûr les besoins pour des soins non compris dans notre système de santé, nous ferons remplir ce papier maudit.
On va espérer être accepté pour avoir enfin de l’aide, juste un peu, le temps de souffler.
Mais lorsque la lettre arrivera, lorsque nous verrons le mot accepté en noir sur la feuille blanche, ce simple mot brûlera le dernier espoir en nous, que ce n’était qu’une passe. Quand un système complexe, quand aux yeux du gouvernement notre enfant est assez atteint pour avoir droit à une prestation, même si c’est minime, on le prendra comme le bourreau de notre dernier souffle.
Même si l’argent sera grandement apprécié, même si la rétroactivité aidera à payer des comptes en retard, le prochain test au privé ou enfin les spécialistes qui l’aideront, ça donne un coup de poignard en plein cœur.
Et lorsqu’autour de vous les gens vous trouveront donc chanceux de recevoir ce chèque, le motton que vous ravalerez sera celui de votre peine bien enfouie.
Car aucun chèque ne pourra enlever ce désir de voir votre vie comme vous vous l’aviez imaginée quand vous avez vu le positif sur le test de grossesse, quand vous avez lu sur le développement normal d’un enfant. Quand vous avez compris dès les premiers apprentissages de votre enfant que quelque chose clochait.
Rien n’enlèvera cette douleur à l’intérieur de vous car personne ne vendrait la santé de son enfant pour de l’argent, peu importe le montant. Alors quand on vous dira la chance que vous avez de recevoir ces sous de plus, rappelez-vous de ceci : Même si c’est dur, cet argent aidera votre enfant. Même si c’est dur, cet argent vous aidera. Même si c’est dur, oui votre enfant aux yeux du gouvernement est handicapé, mais moi je vous dis de regarder dans ses yeux et vous verrez ce qu’on voit chez tous les enfants : l’amour, l’innocence et bien sûr son immense cœur qui vous verra toujours comme le meilleur des parents.
Peu importe ce qui arrivera, vous serez là, je serai là. Et ensemble, nous finirons par créer un monde meilleur.
Handicapé ou pas, vous avez le droit de vivre votre tristesse, mais comme je le sais, vous finirez par la ravaler pour aider votre enfant à avancer.
Je comprends, je suis là. Et moi aussi ce soir, je pleure en regardant le mot accepté.