Parents, faites-vous solidaires!

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Voici le texte d’une collaboratrice, Stéphanie Rousseau, éducatrice et maman de deux filles « tourettes ».

Je réfléchis et je ne trouve pas de solutions, comme des milliers de parents. Pour eux, j’ai le goût de dire l’inquiétude, pas de m’apitoyer, juste de partager l’anxiété situationnelle par solidarité, même si ça ne changera rien.

Je pense qu’il serait temps de se lever et de se battre pour les parents ayant des enfants qu’on ne garde que huit heures par semaine à l’école ou totalement exclus, faute de services, mais qu’on veut voir en classe régulière à tout prix car c’est obligatoire de scolariser un enfant. S’il n’y parvient pas, faute de services, avec de la chance, il ira dans une rare école spécialisée, après des années d’attente à se battre. S’il n’a pas cette chance, il t’arrivera parfois, de toujours craindre que l’école signale  ton enfant à la DPJ, toi le parent négligent qui n’es pas capable de raisonner ton enfant souffrant, même lorsqu’une équipe médicale n’y arrive pas. Ni même un psychiatre. Il a droit à une accompagnatrice, mais n’en a pas. Si tu penses pouvoir l’accompagner dans sa classe, même sans que ça ne leur coûte un salaire, juste pour que ton enfant soit présent, tu te feras dire non. J’ai essayé.

Puis, avoir les entrailles broyées et le cœur en miettes parce que nous devons placer en centre d’accueil un enfant, pour cause de la maladie, ou même, choisir quel enfant on garde de la fratrie pour diminuer l’impact de la maladie, comme on nous le conseille, puisqu’ils ne sont pas acceptés en famille d’accueil.  Faute de services, d’aide financière, pour que le parent puisse s’en occuper chez lui. Ceux qui ont besoin de spécialistes à coup de 100$ par semaine, multiplié par deux, durant des années, mais qu’avec les rendez-vous, on arrive à peine à gagner un salaire minimum, même diplômée de l’université, puisqu’il faut payer un loyer, d’où on ne s’est pas encore fait jeter dehors. Mais parce qu’on travaille, on doit consulter plus longtemps, faute de temps, pour donner du calme, du temps pour les exercices, les encadrement et les stimulations.

Me semble qu’avec le même revenu qu’une famille d’accueil, je reste chez moi et je sauve au gouvernement le salaire d’accompagnatrice, de psy, d’ergothérapeute, de nutritionniste, de rééducation visuelle, d’orthophoniste, d’orthopédagogue et de travailleur social de la DPJ…

Ça ne se voit pas physiquement, mais avoir le Syndrome de Gilles de la Tourette avec des troubles associés, plus la maladie mentale et un trouble spécifique d’apprentissage sévère, c’est lourd et tout n’est pas blanc ou noir. C’est l’île de la zone grise où nous y sommes seuls. Comme une île déserte. La souffrance ne trouve d’écho que l’impuissance d’une maman à bout de ressources.

Lorsqu’une fillette dit porter le chapeau de la honte à l’école parce qu’elle est mise dans un coin ou qu’elle plafonne… Les cas de santé deviennent lourds… La vie devient lourde pour la famille  parce que le système trop lourd d’incohérences brise aussi des familles, des vies… Leur estime et leur espoir, souvent plus vidant de se battre contre le système que la maladie, tout ça pour vouloir fondamentalement continuer, avec dignité, de prendre soin de leur enfant…

Monsieur le ministre, refaites vos calculs et révisez vos critères, agissez en bon père de famille! Une maturité physique n’égale pas une maturité psychologique, affective, émotionnelle. Pour bien des enfants, à 30 ans, ils en auront 16. Et ils vivront avec leurs parents, qui ne sauront jamais ce que c’est de partir à la retraite et qui n’auront jamais vécu autre chose comme loisir, que le « ruminage » anxieux de partir avant leurs enfants. Est-ce que c’est toujours léger, pas trop handicapant?

Oups un imprévu… Zone grise encore… Le diagnostic tombe, encore, après des années d’évaluation… Mes deux autres filles ont des besoins spécifiques. J’espère, après ces rendez-vous multiples, qu’elles n’auront pas un rhume ou la gastro… Mes dix jours de congés par année sont écoulés, je vais perdre ma job… Je coupe sur quoi, le loyer ou les soins?

Parents, faites-vous solidaires!

Stéphanie Rousseau

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