Monsieur Gilles de la rue Tourette

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Sacré monsieur celui-ci. Tiens, mettons-lui une majuscule pour l’occasion.

Monsieur Gilles a eu une enfance plutôt ordinaire. Un enfant heureux et souriant parmi tant d’autres. Il faisait le bonheur de ses parents.

Ah! Le bonheur et l’innocence! C’est vraiment fondamental, surtout quand on n’est qu’un enfant.

Vers 7 ans, Monsieur Gilles emménage rue de la Tourette. Les choses commencent alors à se corser pour lui. Les moqueries battent leur plein. Monsieur Gilles perd sa joie, un peu plus chaque jour. Les larmes commencent à rouler sur ses joues d’enfant. Après tout, ce n’est pas de sa faute si ses yeux clignent très fort tout seul.

Non, il ne se moque pas de ce que vous lui dites, mais on dirait que ses épaules n’en font qu’à leur tête. C’est incontrôlable, il n’y peut rien Gilles, même si sa maman commence à se dire que ses tics deviennent de plus en plus importants et que ça lui rappelle vaguement un vieil oncle. Et puis, plus on se moque, plus on l’agace, pire c’est. Alors à l’école, ça ne se passe vraiment pas bien. Il est souvent seul, exclu, proche de l’échec scolaire parfois.

Monsieur Gilles va grandir oui. Mais le voilà maintenant qui se met à crier et pas forcément de jolis mots. Ça sort comme ça, tout seul, alors les moqueries vont crescendo, car c’est bien connu, les enfants, petits, sont moqueurs, mais en grandissant, ils peuvent devenir bien plus méchants… Monsieur Gilles, cette situation lui fait mal. Il veut partir, partir loin d’ici, dans un monde où il pourra être lui-même, sans gêner ou sans mettre mal à l’aise ses proches.

Puis un jour, par un beau matin, comme si ses vœux venaient d’être exaucés, Monsieur Gilles va mieux. Alors, il profite notre Monsieur Gilles, de cette période où il peut revivre. Tout cela ne devait être qu’un mauvais cauchemar… Peut-être. Monsieur Gilles fait reprendre un court normal à sa vie.

Mais… Ce que ce pauvre Monsieur Gilles ne savait pas, c’est que le répit ne serait que de courte durée et que tous les troubles reviendraient et le remettraient dans le même embarras qu’autrefois.

Cette fois-ci, Monsieur Gilles va chercher, accompagné par sa famille, à comprendre ce qui se passe. « Qu’est-ce qui ne tourne pas rond chez moi Docteur? » lâchera-t-il, fatigué par la situation et très désolé de son comportement pas très adapté.

Le médecin lui fera passer beaucoup de tests, plus éprouvants les uns que les autres. On finira par lui donner des pilules à avaler au quotidien « tu parles d’une vie », on l’entendra souvent ronchonner. Des « neuro quelque chose », des « anti-machins », effectivement Monsieur Gilles, ce n’est pas facile. Mais en attendant, cela fera son petit effet.

Monsieur Gilles vivra donc ainsi. Ce n’est pas le bonheur oui, mais maintenant, il est grand et avec les mots posés, les personnes sont devenus moins agressives envers lui, même si… Les adultes parfois, ce n’est pas mieux que les enfants.

Monsieur Gilles restera dans sa rue Tourette toute sa vie. Alors, si un jour vous le croisez, n’ayez pas pitié, faites juste preuve de sincérité. Discutez avec lui, proposez-lui de l’aide si vous le voyez en difficulté (même si par fierté souvent, il refusera), essayez d’obtenir sa confiance et devenez son ami. Vous verrez, ça changera votre vision de la vie. Mais surtout, n’oubliez pas de l’embrasser pour moi.

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Ophélie, alias la mère bleue, maman de 3 enfants différents. Ici, on jongle avec l'autisme, le haut potentiel intellectuel et le trouble de l'attention. Chez nous, pas de place à l'ennui. Une vie riche, mouvementée et j'adore. Je suis aussi présidente-fondatrice de l'association "Les yeux bleus". J'aime bouger, faire bouger. Ma passion? L'écriture et la différence est le plus beau des sujets.