La marijuana a sauvé ma santé mentale (plaidoyer pour la tolérance)

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Je vous partage le texte d’une collaboratrice anonyme pour qui la marijuana est un exutoire pour préserver sa santé mentale. Je vous prierais de commenter et de débattre de ce nouvel enjeu de société dans le respect et sans jugements. Merci de votre compréhension.

Je vois arriver la légalisation prochaine de la marijuana avec un certain soulagement parce qu’enfin, je n’aurai plus à me cacher pour aller fumer mon p’tit gringo de fin de soirée de peur d’être dénoncée à la DPJ. J’ai espoir qu’avec cette loi, peut-être, les mentalités évolueront et que la population arrêtera de voir les mères qui fument comme des délinquantes notoires, inaptes à prendre soin de leurs enfants. Et j’insiste sur le mot « mère » en caractère gras, surligné en jaune avec des étoiles rouges à côté. Parce qu’on s’entend, des pères poteux, on en connaît tous au moins un.

Combien ont déjà échangé des regards moqueurs en voyant un papa s’éclipser en douce d’une fête familiale en sachant très bien qu’il « allait faire une marche »? À son retour, on se moque de ses yeux rouges et brillants à coup d’œillades complices et de coups de coude dans les côtes. On fait quelques blagues au deuxième degré… puis on passe à autre chose. Ce n’est pas la fin du monde après tout. Une maman, à moins d’être en présence d’une personne d’extrême confiance (sous-entendu ici « d’autres fumeurs »), ça ne se permettra pas de fumer avant 22h les fins de semaine et seulement en plein milieu du bois à 25 minutes de marche de chez elle. Juste au cas où elle croiserait quelqu’un. C’est pour ça que le vin est si populaire. Beaucoup plus facile d’accès, plus discret et socialement acceptable.

Je ne me considère pas comme une toxicomane. Vous ne me retrouverez pas à dormir sur le gazon devant la maison parce que je suis complètement défoncée. Je ne mettrai pas non plus la vie de mes enfants en danger en les laissant seuls pour aller voir mon dealer. Je ne perdrai pas tout ce que j’ai à cause de dettes de drogue ou parce que je consomme de façon démesurée. Non. Je suis juste une maman qui en a plein les bras et qui fume un joint pour se détendre comme d’autres boivent une bière après une grosse journée de travail. Je le fais à l’extérieur de la maison, à l’abris des regards curieux des enfants… mais oui, je le fais. Je fume les semaines où je dors 3h dans ma nuit et que je suis si épuisée que c’est le seul moyen de me faire manger. Je fume pour donner une pause au hamster qui tourne sans arrêt dans ma tête et qui me garde éveillée jusqu’aux petites heures du matin. Je fume quand les crises de mon enfant son si intenses que j’ai peur de ma propre réaction, que j’ai besoin de relâcher la pression avant de dire ou faire des choses que je pourrais regretter. Deux-trois puffs et je me détends, je me sens plus forte, prête à affronter les défis et à repousser la machine une journée de plus.

Mais tout ça, je dois le garder pour moi. Même mon conjoint, qui fume pourtant aussi, à un malaise à aborder le sujet publiquement. C’est cette culture du secret qui m’a poussée à taire cette condition lors de ma grossesse. Je vois d’ici vos faces : « QUOI? Elle a consommé pendant sa grossesse? » Je plaide coupable votre honneur. Et toute ma vie, je devrai vivre avec un sentiment de culpabilité et le doute que je suis peut-être la cause de l’autisme de mon enfant. Mais vous savez quoi? Vous n’étiez pas dans mes souliers. Vous n’étiez pas là quand je vomissais mes tripes 24 heures sur 24, pendant neuf mois. Que ni le Diclectin ni aucun autre médicament ne faisait effet. Que j’étais épuisée en permanence. Parfois, je pouvais passer jusqu’à 48 heures sans manger, juste pour donner un répit à mon corps. Dans ce temps-là, les effets apaisants de la marijuana étaient particulièrement bienvenus. Pendant un court laps de temps, j’étais capable de garder la nourriture et de détendre mes muscles endoloris, voire dormir quelques heures consécutives.

Avec les années, j’ai croisé quelques mamans qui m’ont timidement confié vivre elles aussi la même situation. Sous le sceau de l’anonymat, certaines m’ont même affirmé que leurs obstétriciens étaient au courant, qu’ils en avaient tenu compte dans leur suivi de grossesse et avaient ainsi pu adapter leur plan de naissance. Au besoin, ils pouvaient même faire la prescription de marijuana pour des fins médicinales. Alors, dites-moi pourquoi, malgré une prescription et le feu vert médical, elles ont quand même fumé à l’insu de leurs proches, de leurs conjoints? Parce que trop de gens sont encore ignorants et ce qu’on ne comprend pas, on en a peur et on le juge.

J’ai espoir que la décriminalisation de la marijuana rende moins tabou la consommation chez la mère. Que plus de chercheurs commandent des études de cas pour éventuellement émettre des recommandations et encadrer de façon plus sécuritaire cette pratique. Nous l’avons fait pour l’alcool et les drogues dures comme l’héroïne, nous avons un devoir de société de s’y pencher aussi. Et vous, qu’en pensez-vous? Je veux vous entendre sur ce sujet…

Anonyme

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