J’ai un handicap

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Le Syndrome de Gilles de la Tourette est souvent décrit comme un soleil, puisque les tics sont le centre du diagnostic qui est souvent accompagné de troubles associés qui rayonnent sur tous les aspects de la vie. C’est aussi un diagnostic méconnu et encore rattaché à plusieurs préjugés. Les textes qui vous sont présentés dans ce projet visent à sensibiliser les gens, à mieux faire comprendre ce qu’est véritablement le SGT et comment il peut être vécu par chacun ou chaque famille.

J’ai un handicap, je suis mère naturelle d’une enfant porteuse de maladie. Naturellement, elle est handicapée.

Sa nature dénature ce qu’il y a de normal. Elle perd ses couleurs sans que rien n’y paraisse lorsqu’elle prend racine dans sa détresse.

Elle déferle telle une mer de vague folie, ce qui, dans vos mentalités, est inacceptable. Elle est mentalement irréparable aux yeux des gens irréprochables.

Parfois, son bateau intelligent prend l’eau. Il s’échoue au milieu de nulle part et elle échoue dans tout et  partout lors d’une tempête dans sa tête.

Alors je la rescape et elle se rattrape à la nage, la survenance plein de larmes, plein de drames. Elle se résilie et elle sourit. Elle est comme un chat, elle a déjà usé trois vies, elle est pourtant si neuve.

Si neuve et si vieille en dedans. Elle est une petite tortue aux si jolies fenêtres, qui vous regarde droit devant et extériorise votre âme en un coup de vent.

Elle a mal à sa douleur. Elle est souffrante. Elle a trop chaud, elle bouillonne provoquant des frictions chez les frileux conformistes.

Elle a toujours ce frisson de différence qui la distingue des gens et qui leur donne la chair de poule. Leurs poils s’hérissent de honte et de jugements.

Elle est mon petit porc-épic, toujours piquée de cette aiguille au bras, luttant pour essayer de tempérer son humeur, sans faire mourir son cœur. Dur d’arrimer tout ça.

J’ai un handicap. Voilà, j’ai enfanté, j’ai engendré. Je suis porteuse du gêne de la différence qui vous gêne.

Cet ange qui vous dérange puisqu’elle semble diaboliquement dérangée. Sa perception est altérée. Elle est mon alter-ego.

L’égo gros, elle est à l’image de ces haltérophiles qui même avec le temps qui défile, préservent leur force pour soulever la lourdeur du poids.

Sa réalité est déformée. Elle passe des heures à s’observer, à perfectionner son masque devant le miroir, bien qu’elle en ait une phobie. Et avec raison! Une mauvaise entité pourrait en sortir et s’emparer de son identité mal étiquetée et non définie.

Comme elle n’arrive à rien terminer, les docteurs savants, ne savent pas la déterminer ni nommer qui elle est. Pourtant, à sa naissance, je l’ai su tout de suite. Taïka, « lever de soleil ». Je ne suis pas folle, c’est bien ainsi que je l’ai prénommée.

Malgré tout, je n’ai pas oublié. Cela les soulage de la rebaptiser. Au moins, ils sauront à qui ils auront à faire dans l’avenir. Dans celui de ma fille, qu’il diagnostique de précaire et d’incertain, suite à leur évaluation qui la dévalue et  la dévalorise socialement parlant.

C’est dingue, ils ne sont jamais d’accord sur le nom qui lui colle à la peau, tel un pansement puisqu’elle a trop de bobos. Foutaise! C’est de leurs blessures que je dois panser les douleurs de ma fée… ma pauvre petite bête de foire.

Ils sont fous! La vie pour nous n’est pas un cirque, à jongler avec tous ses médicaments pour son état. Moi, j’évalue qu’elle est là, voilà son état, être.

Conquérante, dans tout son pays, drapeau de maladie, elle est là, prête au combat. Elle sera guerrière toute sa vie. Pour elle, pour moi, elle exécute son numéro plein de mimiques, dans sa bulle. Petite fée funambule déséquilibrée.

Or, je ne suis pas folle, je sais, j’ai un handicap, une fille handicapée. Dans ce cas cliniquement envahissant, il n’y a pas deux poids deux mesures, non! Il n’y en a qu’une seule, l’aimer démesurément. Je la porterai jusqu’au bout de moi comme je l’ai déjà porté.

Elle est mon handicap… sans elle et sa folie, je suis invalide. Elle est ma plus belle guérison!

Je t’aime ma fée!

Stéphanie Rousseau… Survenante

#sensibilisation #SGT #15maiau15juin

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