Écoute-moi

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Avant même de recevoir le diagnostic d’autisme de mon fils, j’ai commencé à me confier au sujet des problèmes que j’observais chez lui. Dès sa naissance, j’ai senti qu’il était différent. Vers 12 mois, j’ai commencé à me douter qu’il était autiste. Lorsque je me confiais sur le sujet, la plupart des gens ne savait pas trop quoi me dire, je crois qu’ils se sentaient mal pour moi, alors ils cherchaient des raisons (autre qu’un trouble développemental) qui expliqueraient les comportements de Mathis. Au lieu de m’écouter sur mes peurs et mes angoisses, ils les niaient en me disant que ça allait passer et que leurs enfants aussi avaient de tels comportements étant plus jeunes ou trouvaient plein d’exemples pour contredire mes doutes. Moi j’avais besoin d’une oreille à qui me confier, de quelqu’un qui me dirait : je vois que tu es inquiètes, je suis là pour t’écouter. Pour me protéger, les gens de mon entourage me disaient plutôt : « Tu t’inquiètes pour rien! Arrête de t’en faire ça va se placer! Mathis autiste?! Ben non voyons!! » Ça me faisait terriblement mal et je me sentais vraiment seule. Même mon mari était dans le déni à cette époque : j’étais seule.

Quand il avait 2 ans et 3 mois, nous avons eu le diagnostic d’autisme officiel. Une équipe multi-disciplinaire a évalué Mathis sous toutes ses coutures : aucun doute, notre fils a un TSA. Même si je m’en doutais, j’étais ébranlée, inquiète, mais je me disais : enfin les gens arrêteront de dire que j’ai tort et seront là pour m’écouter au lieu de nier la situation; j’allais enfin me sentir moins seule. Malheureusement ce ne fût pas si simple. Certaines personnes ont choisi de ne pas aborder le sujet et d’autres ont mis en doute le diagnostic. Quelqu’un m’a même suggéré d’aller refaire évaluer mon fils par une autre équipe de professionnels. Pourtant, c’était clair comme de l’eau : Mathis est autiste. Quelques personnes ont été là pour moi, mais je me sentais tout de même très seule. Comme si personne ne pouvait comprendre ce que je vivais.

Alors j’ai commencé à parler de ce que je ressentais et à expliquer le développement de Mathis aux personnes de mon entourage. Pour que les gens le comprennent et comprennent un peu mieux ma situation. Même si on ne me demandait pas comment ça se passait avec mon fils, moi je prenais les devants et j’en parlais. Pour me sentir moins seule, mais aussi parce que j’avais le sentiment que c’était mon devoir de mère de faire connaître le monde de l’autisme à mon entourage, pour qu’ils saisissent bien notre réalité et que mon fils soit compris. À partir de ce moment là, chaque fois que je me confiais sur une difficulté, la personne devant moi ne pouvait s’empêcher de me donner ses conseils. Dès que je parlais de quelque chose qui n’allait pas, on me donnait toutes sortes de conseils qui se contredisaient les uns les autres. Pourtant, ce n’est pas ce dont j’ai besoin! À moins d’avoir mentionné dans la conversation : « Qu’est-ce que tu en penses? » Ou encore: « Tu ferais quoi à ma place? » Moi, je veux seulement être entendue, être écoutée, comme c’est le cas depuis le tout début.

Je sais que tu veux m’aider, je l’apprécie, mais je n’ai pas besoin de tes conseils, à moins que je te l’aie demandé. Ne le prends pas mal, mais j’ai juste besoin que tu m’écoutes. Parce qu’il n’y a souvent pas de solution à mon problème, j’ai juste besoin de ventiler, j’en ai trop sur les épaules, ça m’aide d’en parler. Je n’ai pas besoin de tes conseils parce que j’ai déjà une équipe de professionnels qui me dit quoi faire au quotidien avec mon fils : le pédopsy, le pédiatre, l’orthophoniste, l’ergothérapeute, l’éducatrice spécialisée, la psychoéducatrice et j’en passe! La majorité d’entre eux, je les paye pour qu’ils me donnent leurs conseils. Je les appelle pour qu’ils me trouvent des solutions. Ne pense pas que c’est parce que je crois que tes conseils ne sont pas bons, ce n’est pas ça, c’est juste que ce n’est pas ce dont j’ai besoin et aussi parce que j’en reçois tellement de conseils que je finis par être perdue, envahie et surtout, je finis par me sentir seule. Parce qu’au final, personne ne m’écoute, ils me donnent tous leurs conseils.

Saches que je tente de faire la même chose avec toi : de t’écouter et de te conseiller seulement si tu me le demandes. Ce n’est pas facile, car souvent on veut aider alors on cherche des solutions. Alors ce n’est pas grave si tu t’échappes, parce que ça m’arrive à moi aussi. Mais s’il-te-plaît, écoute-moi, c’est tout ce dont j’ai besoin. C’est ce qui me fait du bien.

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Mère de 4 enfants, Christine a toujours su qu’elle réaliserait un jour son plus grand rêve, celui de devenir maman. Ayant travaillé plusieurs années auprès d’enfants autistes, elle croyait bien maîtriser toutes les facettes de la différence, mais lorsque son deuxième fils est né autiste, à sa grande surprise, elle réalisa qu’au fond, elle ne savait pas grand-chose sur le sujet! Son premier fils vit avec un trouble de l'information sensorielle ainsi qu'avec un trouble anxieux, son troisième fils, qu'à tant lui, vit avec une dyspraxie verbale. Le quotidien de cette famille différente est loin d'être ordinaire! Christine est aujourd'hui représentante pour des outils sensoriels et des jeux éducatifs chez Équipement de bureau Robert Légaré. Elle vous partagera ici, ses bons et moins bons moments, ainsi que ses coups de cœur en espérant sensibiliser, informer et toucher les lecteurs sur l'autisme et tout ce qui l'entoure.