Anxiété, je suis vidée!

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Voulez-vous savoir à quoi ressemble un moment dans la vie d’une personne ayant un trouble anxieux? Voici un exemple vécu par mon petit homme.

Mon petit homme revient de l’école vers 15h15. Il entre dans la maison en catastrophe et vient tout de suite me trouver. Il est complètement envahi par sa première dent qui branle. La première chose qu’il me dit c’est que sa dent branle. Il la fait bouger avec ses doigts et me dit qu’il n’a pas pu arrêter de faire ça de la journée, que ça le dérange. À ce moment, je me doute bien qu’on est pas sorti du bois. Et là, suivent les questions et les commentaires en rafales : «Est-ce que je peux l’avaler?» « Est-ce que ça va faire mal?» «Est-ce qu’elle va tomber le 17?» «Dans combien de dodos elle va tomber?» (en faisant des aller-retour entre son calendrier et moi), «Ça me dérange, j’y pense tout le temps dans ma tête» «Je dois battre le record de 40»«J’espère que mon professeur va me donner mon collier pour mettre ma dent» (Faut savoir qu’à son école, ils ont un magnifique projet qui dédramatise et valorise la perte des dents) Vous comprenez que ça n’a pas cet effet chez nous. Au contraire! À ce moment, je sais pertinemment qu’on est dans la merde et que notre soirée sera un calvaire. Je le calme, le fais respirer et je prends le temps de répondre à chacune de ses questions afin que les choses soient claires et que nous puissions passer à un autre appel. Malgré que nous l’avions préparé à cette situation, tant qu’il n’a pas vécu sa première fois, c’est TOUJOURS comme s’il faisait face à l’apocalypse. Une fois rassuré, il peut enfin ramasser ses vêtements d’extérieur étalés partout sur le plancher et aller faire sa détente dans sa chambre. Sa détente… Bon, elle n’était pas très efficace cette fois-ci. Mon petit homme sortait sans cesse de sa chambre pour me poser les mêmes questions auxquelles j’avais pris le temps de lui répondre quelques minutes plus tôt. Je le retourne à sa détente, dans sa chambre. Je le retourne, je le retourne encore, le retourne, etc.

Vient l’heure de sa collation. Alors qu’il est enfin assis pour manger, j’entends hurler comme un putois qu’on égorge. Ça y est, c’est reparti! Petit homme a mangé sur sa dent… Il crie, pleure, les larmes lui sautent en bas des yeux, il saigne. Ça y est, c’est la fin du monde. Je vérifie avec enthousiasme si elle est tombée, mais la mautadine est encore là. Grande déception à l’intérieur de moi. Je réussis à désamorcer la bombe, je rassure la victime et je réussis à lui trouver une consolation : une nouvelle collation. (Je n’ai pas pris de chance, j’ai opté pour un yogourt)

On doit maintenant s’attaquer aux devoirs. Naturellement, fiston s’oppose. «Je suis pas capable de travailler à cause que ma dent me dérange» Il crie, il pleure, il dit être fatigué… Je serre des dents et je respire. Je respire tellement que je suis à la veille d’une crise d’hyperventilation. Je lui suggère son moyen préféré qui est de se rouler en petite boule dans sa couverture douce pendant un temps sur la minuterie. (Le TIME TIMER est l’un de mes meilleurs amis. Tout parent devrait avoir ça à la maison, je l’adore) Bon, chuuut… il est en silence. Vive cette couverture aux super pouvoirs magiques. Sa sœur va pour lui parler. NOOOONN!!! «Tu ne lui parles pas. Il prend ses moyens, il n’est pas bien dans son cœur (je devrais dire dans sa bouche lol).

On s’installe pour les devoirs! Il ne cesse de se lever, de se promener partout, il est très éparpillé. Il ressemble à une balle rebondissante. C’est très difficile de se mettre à la tâche. Chaque fois qu’il finit par s’asseoir, quelque chose lui vient en tête. Comme… sa foutue dent que j’ai envie de lui arracher moi-même de toutes les façons possibles que l’on peut retrouver sur Youtube (Tant que ça marche) et que l’on puisse arrêter d’en parler une bonne fois pour toutes. Il recommence… «Est-ce que je peux l’avaler?», «Est-ce que ça va faire mal?», «C’est quand je vais la perdre?», «J’ai peur de l’avaler pendant la nuit?», «Je dois battre le record de 40 dents tombées». Je le ramène à la tâche, le ramène, le ramène encore, le ramène, etc. Pas besoin de vous dire que nous n’avons fait que le minimum dans les leçons!

Au souper, vers 17h, on vit encore le même scénario. J’ai l’impression de vivre et de jouer dans le film Le jour de la marmotte avec Bill Murray. J’ai les oreilles en chou-fleur, les nerfs en compote et j’hyperventile toujours.

On avance dans la routine. On est rendu au brossage de dents! (Courage, l’heure du dodo approche!) Mon petit homme s’oppose, panique, pleure, essaie de se sauver… Il a peur que ça fasse mal. Je négocie, je l’accompagne de force et j’amorce la tâche. Il finit par l’exécuter et la terminer. Mon petit homme va faire son pipi d’avant dodo et là, avec son trouble de langage et un discours rempli d’injonctions, il me déboule le tout en respirant à peine: «Je ne veux pas dormir, j’ai peur de l’avaler», «J’ai peur de l’avaler en mangeant», «J’espère que mon nom sera au TBI quand je vais la perdre», «Je veux battre le record de 40 dents tombées», «Je ne sais pas quand je vais la perdre», «C’est tout ça qui me dérange!»

Je lui ai fait de grands yeux et j’ai éclaté de rire. Il se demandait ce qui se passait et je lui ai dit : «Ça en fait des choses!!!» Il a ri et j’ai pu l’amener à sa chambre. Dans son lit, il repart! Il fait jouer sa cassette qu’il avait rembobiné. GRRR… En lui faisant ses petites chatouilles (frissons), je lui dit: CHUUUT… Ferme les yeux, fait dodo.

OUF!!! 19h30, il dort. Je suis vidée.

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Je suis une éducatrice spécialisée de métier et maman de trois merveilleux enfants qui doivent composer avec leurs différences et les obstacles que ces différences leurs occasionnent quotidiennement. Cette vie familiale au rythme particulier nécessite plusieurs adaptations tant sur le plan familial, sur le plan amoureux que sur le plan professionnel. Je me fais un plaisir de vous partager mon vécu, ma réalité, afin de sensibiliser notre société aux enfants différents ayant des besoins différents. Connaître, comprendre, c'est mieux accepter.