Pardon…

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Il y a des mots qui nous restent dans la gorge, des culpabilités qui nous rongent l’âme et des idées noires qui nous vrillent le ventre à chaque fois que l’on voit son enfant différent lutter dans la vie contre cette injustice qu’est son quotidien…

Alors j’écris cette lettre pour me libérer de ce poids face à mon fils, lui demander pardon de tout ce que je me reproche et peut-être me pardonner à moi aussi :

Pardon mon fils de ne pas t’avoir protégé dans mon ventre de toutes ces émotions qui me submergeaient au point d’avoir provoqué un accident de voiture ou d’avoir détesté te sentir en moi. Il parait que dans notre ventre, les bébés sentent tout et je suis désolée que tu n’aies pas eu pour tes premières secondes de vies en moi que de l’amour et du bonheur. J’étais si malade par les nausées, si terrifiée par ta venue et déjà, je sentais que je ne serais ce genre de mère épanouie à la seule vue de son enfant. Tu méritais tellement mieux qu’une mère angoissée et malade. Pardon de ne pas t’avoir accueilli dans ce monde de manière sereine et ouverte…

Est-ce pour cela que le monde t’a fait peur? Que tu ressens tout si intensément et que l’angoisse fait partie de toi? Je m’en veux tellement, si tu savais.

Pardon de ne pas avoir compris instinctivement comment tu fonctionnais. Ce fameux instinct maternel ne me fut pas donné à ta naissance. Tu me paraissais étranger, incompréhensible et je me sentais si nulle de ne pas comprendre tes besoins. Voir ces  mamans qui réagissaient aux pleurs de leur poupin et les apaisaient d’un sourire ou d’une caresse me trouait le cœur. Rien ne fonctionnait. Je n’avais pas les clés et je t’en ai voulu de ne pas vouloir de moi, de ne pas te sentir sécure avec moi. Mais qu’est-ce que j’ai loupé?

Est-ce pour ça que tu ne me fais pas confiance? Que tu ne me réponds que par opposition et insolence? M’en veux-tu de ne pas être assez mère pour te calmer et te comprendre?

Je suis tellement désolée. Certains jours, je ne me comprends pas moi-même non plus. Je pensais que les pros nous aideraient, qu’ils comprendraient, mais ils ne voient que notre relation comme un problème. Peut être ont-ils raison? Comment réparer ce que j’ai cassé sans le savoir? Si tu savais le nombre de nuits où cette question m’a tenue éveillée…

Pardon de ne pas toujours voir tes progrès et de m’inquiéter de tes faiblesses. Pardon de ne pas toujours être juste ta maman, mais aussi ta psy, ta thérapeute, ton éducatrice… J’ai toujours l’impression de ne pas faire assez pour toi et de trop te demander. Je voudrais que tu puisses avoir une vie de petit garçon qui ne pense que Spinner, copains et bonbons.

Est-ce pour cela que tu veux t’envoler loin dans les étoiles? Toi qui rêves de l’espace, de cosmonautes et de planètes à découvrir… Me laisseras-tu une petite place dans cet avenir?

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Professeure dans une école au public difficile, Liza pensait avoir tout vu de la différence jusqu'à ce qu'elle devienne maman d'un petit garçon extraordinaire qui a chamboulé ses convictions autant que son cœur. Les premières années furent marquées par la culpabilisation médicale et les nuits sans sommeil à tenter de comprendre un bébé qui ne voulait pas en être un et ne suivait pas l'évolution classique d'un enfant : entre les crises de colère et d'angoisse , les dinosaures et l'espace, il y avait de quoi se sentir perdue. Il a fallu entamer la longue marche des diagnostics mais Aspiboy est un filou qui ne rentre dans aucune case. Même dans sa différence, il est différent. Il a toutefois séduit par son humour et sa vivacité de nombreux internautes qui suivaient Liza devenue Maman Aspie pour la sphère Facebook et qui gère aussi le groupe de soutien Croco Mum pour les mamans différentes car ensemble, on est plus fortes.