Avoir un autre enfant malgré la différence

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Depuis que nous sommes ensemble, mon mari et moi savons que nous voulons plusieurs enfants. Notre rêve était d’en avoir quatre. Dès le début, nous nous disions que nous allions voir au fur et à mesure comment se présenteraient les choses. En septembre 2011, nous avons eu notre premier fils, Gabriel. Un joli et merveilleux garçon dont nous sommes vite tombés amoureux. Nous étions littéralement sous le charme.

Très rapidement, nous en avons voulu un autre. Nous avions tellement d’amour à donner et de joie à partager. Je suis donc tombée enceinte de notre deuxième enfant lorsque Gabriel avait 5 mois. En décembre 2012, Mathis est né. Dès sa naissance, notre deuxième petit trésor avait ses particularités. Plus les mois passaient, plus je réalisais qu’il était différent. Le quotidien était difficile avec lui, l’interaction était quasi inexistante, il était très difficile à distraire, il pleurait beaucoup et détruisait tout sur son passage. Malgré tout, Mathis avait l’air heureux et nous vivions des beaux moments en famille. Il avait 10 mois lorsque je suis tombée enceinte de notre troisième enfant.

Tout au long de ma grossesse, je voyais beaucoup de traits autistiques chez Mathis et je savais qu’il faudrait bientôt investiguer. Théo est finalement né en juillet 2014. Notre petit rayon de soleil. Nous étions comblés de notre petit trio. En mars 2015, sans trop de surprise, nous avons eu le diagnostic d’autisme de Mathis. Même si je le savais depuis déjà un bon moment, mon coeur de maman a été brisé lorsque j’ai eu dans les mains le rapport du pédopsychiatre qui confirmait que mon enfant était différent. Un choc pour mon mari et moi, pour la famille et les amis. J’ai beaucoup pleuré, j’ai même crié. Tranquillement, nous avons mis en place des interventions pour notre fils. Un groupe de professionnels s’est formé autour de lui. En quelques mois à peine, et avec beaucoup de travail, Mathis a fait de beaux progrès. Depuis son diagnostic, nous avons également remarqué quelques particularités chez notre fils aîné, mais rien d’aussi important que chez notre cadet. Son développement général est normal, mais il est évident que Gabriel vit certaines difficultés. Il est angoissé, très rigide, très impulsif et fait de grosses crises de colère. Puisque qu’il présentait certains signes d’hypersensibilité sensorielle, nous l’avons fait évaluer par un ergothérapeute qui lui a diagnostiqué un trouble d’hypersensibilité sensorielle. Selon le pédopsychiatre et le pédiatre, parfois dans la fratrie d’un enfant autiste, certains membres de la famille peuvent présenter des traits autistiques sans nécessairement être autiste. Il se pourrait que ce soit le cas de Gabriel. Si ses difficultés persistent dans les prochains mois, nous investiguerons à savoir s’il s’agit seulement de traits autistiques ou plutôt d’un trouble quelconque. Pour l’instant, Théo lui, ne présente aucune particularité.

Malgré les questionnements et les inquiétudes, depuis plusieurs mois, mon mari et moi parlons du fait que nous rêvions d’avoir un quatrième enfant. Nous savions que nous en voulions un autre, mais nous ne savions pas quand ce serait le bon moment. Est-ce que ce serait un jour le bon moment? Peut-être que ce moment n’arriverait jamais. Après tout, nous en avons plein les bras avec nos trois petits loups. Particulièrement avec Mathis, qui demande une attention et des soins particuliers. Sans compter nos inquiétudes face à son avenir. Le deuil de l’enfant normal, nous ne l’avons pas fait. On a fait un bout de chemin certes, mais je vous mentirais de dire que nous l’acceptons complètement. Nous avons par contre réalisé, que ce deuil se ferait tout au long de notre vie. Qu’il ne s’agit pas de dire : bon c’est fait, je l’accepte! Il y a du chemin à faire, des étapes à franchir, des blessures, des victoires, des peines et aussi des joies à traverser. Que cela demande du temps et du vécu. Honnêtement, je ne suis pas certaine qu’un jour, je l’accepte à 100%, mais tout ce que je sais, c’est que mon fils est heureux, épanoui et que ses frères le sont aussi. Que nous sommes une famille heureuse, malgré les difficultés. Mes enfants, je les aime comme ils sont.

Toutes ces pensés mijotent depuis un bon moment. Et puis, en octobre dernier, j’ai fait une fausse couche. En fait, je ne savais même pas que j’étais enceinte. Ce n’était pas prévu. J’ai su que j’étais enceinte au même moment où j’ai su que je ne l’étais plus. Ça nous a complètement bouleversé mon mari et moi. De savoir que ce petit être avait existé et qu’il nous quittait. Qu’il ne restait pas. Qu’il y aurait pu avoir un quatrième enfant, celui dont nous rêvions. Le déclic se fit à ce moment-là, malgré les inquiétudes et les peurs, malgré la différence qui rôde dans notre famille, nous aurons un quatrième et dernier petit trésor. Peu importe ce que les gens en pensent, peu importe ce que l’avenir nous réserve, nous désirons cette enfant plus que tout.

Me voilà donc enceinte, d’un petit être qui sera peut-être neurotypique, peut-être autiste, mais qui sera notre enfant, que nous aimerons tel qu’il est. Nous nous adapterons à lui, comme nous le faisons pour chacun de nos enfants, différents ou non. Nous encaisserons les coups et nous nous battrons pour lui. Évidemment, nous le savons que statistiquement, les gènes sont contre nous, nous avons plus de chance d’avoir un enfant autiste qu’un couple qui n’a aucun enfant autiste. Pas besoin de nous le dire, nous le savons. Pas besoin de nous demander si on y a pensé comme il faut, si on est certain de notre décision. Notre décision est mûrie et réfléchie. Pas besoin non plus de nous demander si cela nous fait peur. La réponse est oui. Comme c’est le cas de tous les parents, particulièrement les parents d’enfants différents, mais notre amour pour cet enfant, est beaucoup plus fort que notre peur. Chaque parent prend les décisions qu’il croit être les meilleures pour lui et sa famille, selon sa situation. C’est un choix personnel que nous devons respecter. Mon mari et moi avons choisi d’aller au-delà de notre peur et de foncer.

Malgré mes inquiétudes, je n’attendrai pas son arrivée en ayant peur, mais plutôt en ayant hâte. Hâte de le connaître, tel qu’il est. Hâte de l’aimer, dans les bons et les mauvais moments. Une chose est certaine; qu’il soit différent ou non, il a sa place dans notre famille et dans notre coeur. Nous t’aimons déjà petit trésor.

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Mère de 4 enfants, Christine a toujours su qu’elle réaliserait un jour son plus grand rêve, celui de devenir maman. Ayant travaillé plusieurs années auprès d’enfants autistes, elle croyait bien maîtriser toutes les facettes de la différence, mais lorsque son deuxième fils est né autiste, à sa grande surprise, elle réalisa qu’au fond, elle ne savait pas grand-chose sur le sujet! Son premier fils vit avec un trouble de l'information sensorielle ainsi qu'avec un trouble anxieux, son troisième fils, qu'à tant lui, vit avec une dyspraxie verbale. Le quotidien de cette famille différente est loin d'être ordinaire! Christine est aujourd'hui représentante pour des outils sensoriels et des jeux éducatifs chez Équipement de bureau Robert Légaré. Elle vous partagera ici, ses bons et moins bons moments, ainsi que ses coups de cœur en espérant sensibiliser, informer et toucher les lecteurs sur l'autisme et tout ce qui l'entoure.